Miró, L’empire des signes

DU SAMEDI 11 JANVIER AU SAMEDI 12 AVRIL 2025

Pour faire suite aux expositions consacrées à André Masson, puis aux Surréalistes, la Galerie Frémeaux donne aujourd’hui à voir au public trente-cinq œuvres originales sur papier de Joan Miró.

Si l’artiste catalan adhère au mouvement initié par Breton dès 1924, au moment de la parution du Manifeste, il n’a néanmoins – contrairement à ses complices - pas la moindre volonté iconoclaste de faire éclater l’ordre figuratif de la peinture « bourgeoise ». Seule une « transmutation » des formes vers leur épurement l’occupe. Il opère alors spontanément une synthèse entre les arts populaires, pariétaux, et les images de l’enfance, qu’il mâtine d’humour, de grotesque ou de merveilleux. Un déploiement féérique qui prend diverses tournures.

La première consiste en une habileté à démesurément diminuer ou amplifier les éléments de la réalité (grosse tête, petit corps, cf. Céramiques) évoquant les grylles et les têtes à jambes d’un Bosch. La seconde passe par une jubilation chromatique usant des contrastes et de la dispersion des couleurs (cf. Sculpture). Une troisième se joue à travers un style plus « détailliste » (Jacques Dupin) éparpillant des signes allusifs sur la surface de l’oeuvre (cf. série des Maravillas). Des expressions calligraphiques et ornementales qui vont même jusqu’à se réduire à l’état de fil (cf. Journal d’un graveur). Une abréviation des formes qu’Alexandre Calder traduira dans l’espace. Ajoutons que le contact avec la culture japonaise et l’attention prêtée au zen, ont poussé Miró à rechercher un dépouillement de sa facture, à éliminer tout élément narratif, toute représentation perspective et à abolir le modelé pour laisser place à un pullulement de motifs biomorphiques et jubilatoires (Ubu aux Baléares).

Mais laissons-là l’énumération des procédés formels propres au peintre espagnol, et accordons à chacun le plaisir de (re)découvrir la féérie des motifs qu’il soumet à notre regard.

Christophe Lointier & Patrick Frémeaux